Une belle montée automnale au Pic du Midi

A l’occasion du lancement de la Fête de la Science, le comité toulousain de Sciences en Marche s’est dirigé vers le Pic du Midi de Bigorre. De ce haut lieu de l’observation atmosphérique et astronomique, nous espérions, en cette période d’intenses sessions parlementaires sur le projet de loi de finance 2016 et avant le vote du budget, effectuer une série d’observations afin de déterminer si les promesses du gouvernement de “sanctuariser” l’enseignement supérieur et la recherche étaient en bonne voie.

Seize personnes motivées se sont retrouvées au col du Tourmalet (2115m) à 10h en ce dimanche automnal par une température de 7°C. Tous se sont réveillés de bon matin. Après avoir admiré les Pyrénées pendant le trajet depuis Toulouse, le Pic du Midi de Bigorre bien dégagé se dresse devant nous. Petit stop à Bagnères de Bigorre pour le pain frais, et 40 minutes plus tard nous voici au col du Tourmalet. La présence de lamas, introduits sur ces estives depuis plusieurs années, donnait à ce rendez-vous des allures d’altiplano andin ce qui en a surpris plus d’un ! D’autant que ces camélidés rassemblés au sommet étaient très préoccupés à se tenir chaud, voir plus si affinités, entre les rafales de vent déjà bien présentes. Après cet amusement, chacun fini de s’habiller et de se couvrir car la journée s’annonçait fraîche. Il fut temps de donner le départ à tous ces étudiants, enseignants et/ou chercheurs et sympathisants, dans une bonne humeur généralisée. Après la traditionnelle photo devant le Géant, la sculpture du cycliste en danseuse commémorant le premier coureur à franchir le col en 1910 (ndlr, Octave Lapize), direction le Pic. Il nous faut alors franchir le portillon de la barrière d’accès qui affiche en toute simplicité que ce chemin est interdit à toute circulation, même aux piétons, sic! Vive la montagne privatisée!

Nous empruntons donc le chemin des muletiers, la voie qui historiquement a permis la création et le ravitaillement de l’observatoire du Pic du Midi. C’est aussi l’ancienne route à péage qui dans les années 50 permettait de rejoindre l’Hôtellerie des Laquets à 2658 m, où un téléphérique prenait le relai pour les 200 derniers mètres d’ascension. Le chemin est encore goudronné par endroit, rocailleux à d’autres ; cela monte régulièrement en pente douce et nous en profitons pour admirer la vallée de Barèges et Luz-Saint-Sauveur. Un vent de sud ouest, parfois fort à très fort, entraîne avec lui un ciel bien chargé. Après avoir emprunté deux tunnels, et veillé à ne rien se prendre sur la tête dans le premier dont la voute s’écroule, nous découvrons le lac d’Oncet (2254m) et son bleu profond, endroit très prisé des pêcheurs. Après le deuxième tunnel, c’est le massif du Néouvielle et son sommet à 3091m qui impressionne. Avant d’arriver au col de Sencours on aperçoit les ruines de l’auberge de Sencours construite à la fin du 19ème siècle pour accueillir les premiers savants et randonneurs. C’est là que fut implantée la première station météo. Cet édifice servait également de point de relai pour arriver au Pic du Midi, et le col de Sencours permettait de rejoindre Artigues plus bas dans la vallée de Campan par le sentier des porteurs. Les pionniers de l’observatoire du Pic du Midi y séjournaient, parfois dans des conditions hivernales extrêmes comme le rappelle une plaque souvenir. Pour nous les conditions météo sont devenues de plus en plus humides, et mêlées au vent, les ruines de cette station nous permettent d’y trouver un abri pour reprendre quelques forces et boissons chaudes.

Après le col, la pente s’accentue, et l’Observatoire haut perché impose sa masse auréolée de multiples coupoles. La liaison télécabine depuis la Mongie est bien inerte ; on ne verra monter qu’une seule cabine. Trop de vent peut-être ? La route a laissé la place à un chemin plus accidenté. Le vent semble redoubler de violence par moments, et disparaître à d’autres au détour d’un virage. Le paysage grandiose sur les Pyrénées saupoudrés des premières neiges de l’automne est encore visible et brille sous les rares rayons du soleil. Les sommets ont maintenant la tête dans les nuages et nous la tête sous une pluie fine continue. La cordée s’est étirée. Nous nous faisons doubler par des coureurs de trails en short, sortis en entrainement, ainsi que par deux vététistes affutés. Nous atteignons enfin le col des laquets (2637m) où les bâtiments de l’Hôtellerie du même nom en ruines essayent de résister à l’abandon. Petite halte pour certains pendant que d’autres continuent, car la météo s’est franchement gâtée. Ah ces prévisions qui n’annonçaient la pluie qu’à partir de 17h ! La pluie s’est intensifiée, la température a chuté et les bourrasques de vent jouent avec notre équilibre. Nous sommes au pied du fameux Pic, 200m encore à gravir, la pente atteint les 20%. C’est vraiment raide et dans la caillasse. Tout le monde continue, commence à ressentir les effets de l’altitude, et le pas se fait parfois hésitant. Le sentier est devenu glissant, mais on tient bon. Les jeunes sont devant, mais tout le monde s’accroche. Il nous faut passer sous les rails du vieux monte-charge qui part de l’Hôtellerie, plus que quelques mètres à gravir, et nous voilà au sommet. Les installations de l’observatoire paraissent monstrueuses, insensibles aux vents violents qui les agressent. Un à un nous atteignons la terrasse Baillaud.

Nous sommes tous trempés, la température est négative, et le vent va rendre difficile le déploiement de nos banderoles. Qu’importe, on n’est pas monté pour rien. Les fanions sont dépliés, les chasubles vertes ressorties, et on peut enfin immortaliser par quelques photos notre ouverture de la fête de la science en arborant le slogan : « c’est pas la fête ». Nous avons porté Sciences en Marche au sommet du Pic du Midi, dans un lieu o combien symbolique de la recherche scientifique dans des domaines aussi variés que la météorologie, l’astronomie, la planétologie, la glaciologie, des rayons cosmiques et bien d’autres encore. La bannière de Sciences en Marche au sommet illustre que rien ne peut arrêter la quête de connaissance scientifique. Nous avons scruté l’horizon. Il était bien bouché. Il manquait un bon vent sec porteur d’espoir pour chasser ces nuages qui obscurcissent l’avenir des sciences dans notre pays. Nous sommes redescendus jusqu’à l’Hôtellerie abandonnée en faisant très attention sur ce chemin détrempé. Là, malgré le vent s’engouffrant dans le bâtiment, nous avons pique-niqué sur le comptoir d’un bar encore debout où il a du faire bon raconter ces balades pyrénéennes. L’ambiance est toujours aussi bonne, content de l’avoir fait se dit-on. Et comme on commence à se refroidir, on saute sur place au chant du fameux « qui ne saute pas n’est pas toulou … zain ». Thé ou café chaud, il est temps de repartir. On renfile nos coupe-vent trempés, et la cordée redescend prestement jusqu’au col du Tourmalet, mais les lamas ont déserté ! Le périple s’achève après 5h30 d’effort.

Au vu des premiers éléments du budget 2016 annoncé le 30 septembre par le secrétaire d’Etat T. Mandon, nous avons des raisons d’être inquiets pour l’Enseignement Supérieur et la Recherche (ESR). En effet, alors que l’augmentation du nombre d’étudiants à l’université est de 5% par rapport à 2014, l’augmentation des budgets ne s’élève que de 1.7%… Dans ces conditions, les étudiants se retrouveront très rapidement dans des conditions de travail pires que celles que nous avons déjà dénoncées l’an dernier (cf. blog ruines d’universités, http://universiteenruines.tumblr.com/) et récemment revérifiées lors de cette rentrée universitaire (cf. blog http://masalledecoursvacraquer.tumblr.com/). Coté recherche, avec un budget en stagnation depuis plusieurs années et un nombre de postes ouverts au concours en baisse, les perspectives pour de nombreux jeunes qui ont choisi de se passionner pour la recherche sont bien sombres. Alors que la Fête de la Science s’affiche un peu partout en ce moment, susciter des vocations aujourd’hui alors que les sciences ne sont toujours pas une priorité nationale clairement soutenue s’apparente pour le moins à une tromperie. Pourtant, le gouvernement a les moyens de financer l’ESR, mais il préfère sanctuariser le fameux crédit d’impôt recherche, dont plus de 1,5 milliard d’euros sont détournés… Bref, ce n’est pas vraiment la fête pour les sciences.

IMG_1337

Bravo aux 16 courageux qui ont bravé les intempéries : Angélique, Arnaud, Béatrix, Celia, Claude, Elisabeth, Emilie, Jean-Pierre, Lucie, Michèle, Petra, Rachida, Sandrine, Stéphane, Thierry et Valentin.

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Vous pouvez utiliser ces balises et attributs HTML : <a href="" title=""> <abbr title=""> <acronym title=""> <b> <blockquote cite=""> <cite> <code> <del datetime=""> <em> <i> <q cite=""> <strike> <strong>