Sciences en Marche était invité à présenter les résultats de l’enquête aux journées de l’Appel Des Appels (ADA) les 13 et 14 octobre 2017
Vidéo de l’intervention concernant la précarisation dans l’ESR : https://www.youtube.com/watch?v=f6b5vrjNtHU
La partie sur la précarité dans l’enseignement supérieur et la recherche était la plus précise en termes de chiffres (D.Steinmetz sur l’historique de la précarité et les statistiques générales, F. Bonnarel sur les résultats de l’enquête) et saisissante par les témoignages lus (P. Micheau). Ces trois présentations ont planté le décor de la précarité. Ainsi lorsque B. Chaudret (président du Conseil scientifique du CNRS), qui avait invité Sciences en Marche à présenter son enquête devant l’ADA, parlait d’un monde de la recherche « plutôt sympa » (dans le sens que cet environnement sympa engendrait des difficultés pour les précaires) déjà des protestations véhémentes s’élevaient de la salle. Ah ça non ! Ce que nous avions décrit ne donnait franchement pas cette impression d’un milieu sympa !
Bruno Chaudret a aussi crée l’association « Recherche Solidaire » avec d’autres personnes issues de la recherche publique (Jean-Paul Laumond, François Tronche et d’autres). Elle vise à mettre en contact des coopératives ou associations ayant besoin d’expertise scientifique et technologique et des membres de la recherche publique à même de leur fournir cette expertise, par exemple dans des projets de reprises d’entreprise par les salariés sous forme de SCOP : Recherche Solidaire
Petites brèves des journées de l’Appel Des Appel (ADA): « L’avenir est-il promis à de nouvelles prolétarisations ? Colère et alternatives des professionnels précaires et en voie de précarisation.
Les interventions orales étaient toutes de très bonne qualité et le fond comme la forme des interventions étaient très variées et riches d’information. Les présentations et discussions ont été filmées et sont disponibles ici : http://www.appeldesappels.org/ Journées du 13 et 14 octobre 2017
Alors dans la salle, le vendredi près de 150 personnes, le samedi deux fois moins peut être. Un regret, les auditeurs ayant assisté aux 2 journées entières ne se comptaient-ils pas sur les doigts de nos mains ?
Que retenir :
-La précarité, c’est aujourd’hui devenu le rapport salarial ordinaire au travail avec pour objectif « la réduction du coût du travail »
-La précarité est souhaitée, pensée et organisée pour imposer au salarié des sacrifices car il a peur de perdre encore plus s’il n’accepte pas les reculs proposés : les Goodyears ont dit NON ensemble aux réductions de salaire et aux augmentations des heures de travail ou aux rythmes difficiles pour sauver leur site. Ils ont gagné 9 ans ET ils ont finalement été licenciés avec des primes bien au-delà de ceux qui avaient accepté les reculs dans d’autres entreprises.
-C’est quand on reste solidaire que l’on gagne.
– autre point débattu : quel outil de lutte idéologique développer contre l’idée que la « précarité » serait une liberté ? On trouve maintenant des auto-entrepreneurs chez les peintres du bâtiment, dans des grandes librairies du Bld Saint Michel, à France télévision, les maquilleuses dans le monde du spectacle etc..
-Stéphane Veyer, SCOP Coopaname veut repenser la démocratie en entreprise. Il nous présente ce nouveau modèle économique :
C’est sous le faux nez de la facilitation de la création d’entreprise qu’on a créé et développé le détricotage des droits du travail (dont l’auto-entreprenariat à tout va). Pourtant la création d’entreprise n’est pas l’unique réponse au problème du chômeur : que dire de l’endettement avec du microcrédit par exemple ? Coopaname est né du constat suivant : non, le chômeur ne peut pas créer son entreprise ! Au contraire, Coopaname va l’aider à être co-salarié au sein d’une entreprise en mutualisation, une coopérative ouvrière de 800 personnes. Cette forme de coopération ouvrière existe depuis plus de 100 ans, permettant d’être autonomes collectivement. Pour éviter la subordination on s’associe.
-Non les entreprises n’ont pas trop de charge, le travail n’est pas un cout ce sont des cotisations sociales pour quand on ira mal
-Pour les projets demandant des montants de capitaux considérables, il faut que ce soit l’état qui finance mais on pourrait sans doute tout organiser sous forme de coopérative.
-La coopération et la mutualisation peuvent permettre de faire de l’économie ensemble pour faire assez d’argent pour vivre mais sans recherche de profit.
Faisons-nous travailler les uns les autres, faisons de l’économie ensemble, une fois qu’on aura une force économique, on pourra promouvoir notre projet politique.
Les organisations existantes et émergentes (mouvements mutualistes, mouvement syndicaux, mouvement de protestations… ) freinent à élaborer un projet politique commun, ils devraient pourtant tenter de converger à nouveau ensemble.
– Le système des intermittents du spectacle est un système qui marche et qui pourrait s’appliquer à d’autres métiers impliquant un travail discontinu. D’ailleurs ce système des intermittents n’a jamais été mis en place au prétexte d’une exception culturelle. L’auto-entreprenariat dans le système des intermittents pose problème puisqu’il déstabilise le financement mutualisé.
– L’assurance chômage devrait être une grande cause nationale, car on risque de ne jamais revenir au plein emploi.
-le modèle dominant de l’économie sociale et solidaire est pernicieux : ATTENTION : il s’agit d’une MARCHANDISATION des systèmes sociaux (« Ces gens là c’est comment on fait du business avec la pauvreté des gens »)
On va trouver le : social washing, le social business, l’entreprenariat social et le pire : les Social Impact bond
Cela s’impose avec une sémantique et une rhétorique creuse autour de la performance sociale etc.., sans parler du projet social. Les ultralibéraux font une OPA dessus. « Les associations savent bien faire faire du travail gratuit par les bénévoles ! » Les ultralibéraux cela les intéressent !
Voir le débat de clôture également sur http://www.appeldesappels.org/
Programmes des journées
Vendredi 13 octobre 2017 :
Ubérisation et démantèlement des institutions.
14 h – 14 h 30 : Propos introductif : Bruno Chaudret, chercheur CNRS et président du conseil scientifique du CNRS, membre de l’Appel des appels (ADA) et Roland Gori, psychanalyste, président de l’Appel des appels
1/ 14h30-15h30 : Précaires et en voie de précarisation dans l’enseignement supérieur et la recherche
Coordinateur : Bruno Chaudret
– Daniel Steinmetz, ancien secrétaire général du SNTRS-CGT
– François Bonnarel, ingénieur CNRS, membre du conseil scientifique du CNRS, enquête de Sciences en Marche
– Pierre Micheau, ex-précaire, ingénieur INRA, membre du comité de Sciences en Marche et enquête de Sciences en Marche
2/ 15h30 – 16h30 : Précaires et en voie de précarisation dans l’art et la culture
Coordinateur : Charles Silvestre, journaliste, membre de l’Appel des appels
– Mathieu Grégoire, enseignant-chercheur, auteur de « Les intermittents du spectacle, enjeux d’un siècle de luttes » (La Découverte, 2013).
– Denis Gravouil, secrétaire général de la CGT spectacle, en charge de l’emploi et de l’assurance chômage
– Samuel Churin, comédien, membre de la coordination des intermittents et précaires
Samedi 14 octobre 2017 :
Vivre et travailler à l’épreuve de la précarité : quelles sont les propositions pour sortir de ce processus ?
1/ 9 h00 – 10h30 : L’usine est-elle condamnée ?
Coordinateur : Bruno Chaudret ceux présents
– Fiodor Rilov, avocat (Goodyear, Whirlpool)
- Evelyne Sire-Marin, magistrate, vice-présidente de l’Appel des appels
– absents :- Mickaël Wamen, CGT Goodyear, – Olivier Leberquier, SCOP-TI (Fralib) en formation pour sa SCOP, excusé
2/ 10h45 – 12h15 : Propositions alternatives
Coordinateur : Nicolas Matyjasik, politiste, membre de l’Appel des appels
– Jean-Laurent Cassely, journaliste et auteur
– Bérangère Eldin, ancienne salariée de « atelier »centre ressources régional de l’économie sociale et solidaire
– Jean-Paul Laumond, directeur de recherche au LAAS-CNRS (labo à Toulouse roboticien, titulaire de chaire innovation tehcnologique du collège de France)
– Stéphane Veyer, SCOP Coopaname : repenser la démocratie en entreprise
1/ 14h – 16h30 : Les idées ou solutions auxquelles nous n’avions pas encore pensé : parole à la salle
Séance animée par Roland Gori et Aurélie Ballandras, psychologue, comité local de l’Appel des appels de Poitiers
2/ 16 h 30 – 17 h : Conclusion des journées par Bruno Chaudret, Roland Gori et Charles Silvestre